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Tuesday, August 18, 2020
Christian Jacq et Ramses le Grand
Comme Bernard Simonnay avec Djoser, Christian Jacq a dédié une série de romans sur Ramses (d'ailleurs, Christian Jacq sort avant Simonnay, donc on pourrait dire plutôt "comme Christian Jacq avec Ramses" etc).
Christian Jacq est aussi égyptologue. N'oublions pas, s'il fait de Moïse un frère adoptif de Ramses, que des apologistes des années 80 ont prétendu vouloir situer l'Exode dans les temps de Ramses II. Notre auteur en a tiré les conséquences.
Que je ne suis pas de son côté sur Moïse, je ne suis pas contre la confiance en ses études sur Ramses.
À toute évidence, à en croire Christian Jacq, Ramses était un homme avec de la fogue et de la très bonne chance et du bon goût, et un sentiment prononcé de justice. Un briquetier sous lui devrait avoir été un homme libre et assez bien payé pour vivre et non pas juste survivre.
Donc, si l'Exode avait eu lieu sous lui, les détails de la Bible auraient été déformés pour le défavoriser et pour indûment favoriser Moïse et les Hébreux.
Il y a un hic, c'est que la Bible donne l'Exode qu'elle donne. Il y a un autre hic, c'est que la dix-neuvième dynastie est trop tard pour l'Exode, des chronologies plus ou moins basées sur le texte biblique le situant entre 1400 et au delà de 1600 avant Jésus-Christ (ce dernier est le cas pour Syncellus, mais je ne suis pas sûr comment il va le réconcilier avec le Temple de Salomon entamé 480 ans après l'Exode, quand il pose le Temple en 1032 av. Notre Seigneur). Et il y a un hic majeur, le pharaon de l'Exode est noyé, et de Ramses II, nous avons le sarcophage.
Et donc, je ne vais pas lui faire confiance sur Moïse.
Que l'une des villes mentionnées en Exode est Pi-Ramses, peut être parce que le nom de la ville a été changé par un scribe postérieur à la première rédaction pour tenir compte de l'actualité (un peu comme Christian Jacq utilise des mesures actuelles, comme mètre et kilogramme et litre).
Et je ne vais pas non plus faire de Moïse un contemporain de Ramses.
Pour moi, Moïse est né dans la douzième dynastie, et l'Exode eut lieu dans la treizième, et les hyksôs vinrent juste après, quand l'armée égyptienne noyé laissait l'Égypte en proie de la prochaine attaque.
Pour retourner à Ramses ... il a des traits christiques, on a droit à d'évocations de la terminologie chrétienne (mais que sa mère Touya ait pu être pour les païens d'Égypte "mère de dieu" est possible, et alors Christian Jacq en a fait un point). On pense à un mélange entre Superman moins le côté penaud ou Batman moins le côté womanizer ultra-infidèle et presque Aragorn - ce dernier d'ailleurs en partie imaginé sur modèle pharaonique - et, sans de partager la croyance en des qualifications ou explanations païennes, on l'admire.
Pourquoi y a-t-il eu des Puritains qui dans ce pharaon très réussi et admirable ont voulu voire le pharaon damné de l'Exode? Avant la mission des Apôtres, Dieu avait de la patience avec les païens, et certains avaient des vies très admirables, pourqioi justement prendre le plus admirable des pharaons, ou un des plus admirables (Djoser est candidat aussi) pour le pharaon le plus mesquin et méprisable de la moins réussie des dynasties?
En revanche, une fois que Christian Jacq les suit, et place Moïse dans le temps de Ramses, il se prend la liberté de peindre le paganisme égyptien comme non seulement a-dogmatique (qualification qui convient plus ou moins à tout paganisme classique), mais anti-dogmatique, de manière dogmatique. Ici, je pense que c'est les préjugés plus ou moins franc-maçonniques de Christian Jacq lui-même, et non pas la pensée de Ramses ou de ses contemporains qu'on entrevoit. Autant plus que le vrai Ramses n'a pas eu affaire avec ni Moïse, ni autre exemple du dogmatisme hébraïque. Pour beau que les Égyptiens adoraient Maât, il me semble que c'est Christian Jacq qui fait du dogmatisme un péché contre Maât.
Que cela ne gâche pas le goût pour la relations entre Ramses et Nefertari avec Hattusil et Puduhepa! J'ai loupé le livre avec la battaille de Kadesh, mais on sent que, malgré des raccourcis dans la relation des démêlés entre Hattusil et Urhi Teshub, qui en réalité avait le temps d'être Mursili III, l'égyptologue a bien étudié les diplomaties et les guerres entre Égypte et Hatti, et qu'il a bien décrit les risques pris à propos l'ennemi commun Assyrie. À la limite, Christian Jacq est un peu trop anti-Hatti.
Et que cela ne gâche pas la Dame d'Abou Simpel, ou des relations avec subordonnés, y compris des très fictifs.
Hans Georg Lundahl
Paris
St. Firmin
18.VIII.2020
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